Un dimanche sur les chemins boueux... a bicyclette!
C'est dimanche matin et je compte bien faire la grasse matinee. Malheureusement, le "jour du Seigneur" n'a pas vraiment raison d'etre au pays de la croissance a outrance et je me fais donc reveiller vers 8h00 par le bruit provenant de l'immeuble voisin qui est en chantier! Je tends l'oreille et j'entends les gouttes de pluie qui cognent contre la vitre de ma chambre. Je pousse un gros soupire et je decide de rester au lit jusque vers 9h00. Puis, etant incapable de retrouver le sommeil avec tout ce vacarme, je me leve, je prends ma douche puis je descends commander mon petit-dejeuner. J'opte pour une delicieuse crepe miel-banane et une tartine au beurre et a la confiture mais je recois un petit pain avec du jambon et du beurre, le cuisinier ayant certainement confondu "jam" avec "ham", une erreur classique!
Meme si la pluie tombe encore, je decide de faire mon sac, le descendre a la reception et partir en balade a velo. Je me dis qu'avec mon poncho, ca devrait aller. Je paie donc les 20.00 Yuans pour la location du mountain-bike et je pars dans les rues de Yangshuo. A noter qu'avant de partir, la receptionniste me montre un plan de la region mais comme il ne lui en reste plus un seul exemplaire a donner, je la remercie et lui dis que ca devrait aller, et que je tacherai de ne pas me perdre.
Des que j'arrive sur la route, je me promets de faire super attention car rouler en Chine, c'est difficile et dangereux, et ca l'est encore plus lorsque l'on est un simple cycliste. Ici, le plus fort et le plus gros sur la route a toujours la priorite, autant dire que sur mon velo, je m'attends a me faire couper la route en permanence et c'est a moi de deviner les intentions des autres et anticiper. De plus, mon poncho sur la tete ne m'aide pas vraiment, me bouchant la visibilite laterale. Mais je finis tout de meme par atteindre le pont indiquant la sortie de la ville d'ou je peux profiter d'une superbe, bien que brumeuse, vue sur les alentours.
Oubliant totalement a quoi ressemblait le plan que m'a montre la receptionniste de l'auberge, je decide de suivre mon instinct, et je prends une petite route secondaire, le but etant d'eviter autant que possible la circulation automobile. Je me retrouve ainsi vite sur un chemin de campagne puis sur un sentier grossierement goudronne. Je traverse quelques villages et comme la pluie s'est enfin arretee, je peux finalement continuer sans mon poncho.
Je roule ainsi sans reelle destination au milieu de tres charmants paysages de campagne ou, entre les pics montagneux omnipresents, je traverse de jolis jardins potagers bien entretenus, des etangs et evidemment des rizieres. Puis, ce qui devait arriver, arriva... je me retrouve dans un cul de sac, coince entre les champs et la riviere. Je fais demi-tour, prenant un chemin different et j'essaie au maximum de faire marcher mon sens de l'observation afin de retrouver mon chemin, au cas ou...
Peu apres, meme resultat, impossible d'aller plus loin et avec la brume qui recouvre le paysage et les pics qui se ressemblent tous, je commence a me demander si je vais etre reellement capable de retrouver mon chemin.
C'est alors que je finis par rejoindre une route en terre totalement detrempee et que la pluie incessante a transforme en bourbier! La, je me dis que soit je continue dans la meme direction sans savoir ou je vais, soit je rebrousse chemin en empruntant cette terrible route. La raison l'emporte finalement et en quelques minutes, je me retrouve couvert de boue collante, ne voyant presque plus, ni mes chaussures, ni mon pantalon!
Au bout d'une vingtaine de minutes sur ce veritable "champs de patates", slalomant entre les nids de poule et les flaques d'eau boueuse aussi larges que des piscines, je parviens a retrouver le chemin me ramenant a Yangshuo. C'est alors que je vois sur la facade d'un hotel, un dessin representant le fameux plan pour les randonnees en velo dans la region. Je realise aussitot que je n'etais vraiment pas dans la bonne direction et je me felicite d'avoir eu la presence d'esprit de faire demi-tour car Dieu sait ou j'aurais fini si j'avais persevere...
Sachant ou je dois me rendre, je traverse la ville, forcant le passage a de nombreux carrefours dans la plus pure tradition chinoise, et je me retrouve alors sur une route ou je croise de nombreux autres cyclistes, autant des touristes chinois qu'etrangers. D'ailleurs, la route est presque seche et meme la boue collee a mes vetements s'est mise a secher!
Voila presque deux heures que je pedale, oubliant que je suis sense rouler tranquillement, et non seulement mes habits sont trempes de sueur (je suis decidement incapable de ne pas me donner un fond sur un velo!), mais en plus je commence a avoir drolement mal aux fesses. J'arrive ainsi sur un joli pont ou je remarque que tout les autres cyclistes se sont arretes. Quand je le traverse, je comprends aussitot pourquoi car la vue depuis le sommet vaut vraiment la peine que l'on s'y arrete. Et je ne peux m'empecher d'imaginer, avec une certaine frustration, a quoi aurait ressembler un tel endroit sous le soleil...
Mais tant pis, au moins il ne pleut pas et la temperature est tres agreable, c'est deja ca. Mais ce qui ne vas pas, au contraire, c'est mon ventre qui commence a crier famine! Et ca tombe bien car peu apres, j'arrive au pied du celebre "Moon Hill", un pic rocheux dans lequel des siecles de vent et de pluie ont creuse une immense cavite. Et juste la, au bord de la route, je vois une jolie terrasse. Je pose mon velo et j'y prends une table.
Je commande une soupe et comme celle mangee la veille au bord de la riviere etait fade, j'en demande une "aigre piquante", et rien a boire. Quand la serveuse arrive avec une enorme assiette de soupe et que j'avale la premiere cuillere, je realise mon erreur! Cette soupe est tellement epicee que je crois n'avoir jamais rien mange d'aussi piquant. Et pourtant j'adore la cuisine relevee... J'ai beau essayer, ca ne passe vraiment pas, et je me contente donc de manger les legumes qui la composent tout en esquivant la quantite impressionnante de piments qui s'y trouvent. Et pour m'aider et me soulager quelque peu, je commande encore un bol de riz blanc et une bouteille d'eau!
Avant de partir, laissant la soupe presque intacte a l'exception des legumes qui s'y trouvaient, j'achete encore une orange puis je remonte sur mon velo pour rentrer, les levres encore en feu.
Il est 14h00 et voila deja trois heures que je roule au milieu des plantations de riz, d'orangers et de fraisiers. Je m'arrete de temps en temps pour apprecier le travail des enormes buffles dans les champs ou simplement pour faire quelques pas au coeur des rizieres histoire aussi de soulager un peu mes jambes et mes fesses.
Finalement, il est pres de 15h00 quand je suis de retour dans les rues de Yangshuo envahies par les touristes. Je ramene aussitot le velo a mon auberge. Je suis trempe, non pas a cause de la pluie mais bien en raison de l'effort. Et je ne parle meme pas de l'etat de mon pantalon, mon sac a dos, ma veste et surtout mes pauvres chaussures de randonnee qui sont totalement couvertes de boue!
Je reste ainsi un peu plus d'une heure dans la piece commune de l'auberge, tachant de secher un peu puis juste avant de partir, je tombe sur Daniel et Tilla qui rentrent eux aussi d'une journee en velo. Mais etant donne la proprete de leurs vetements et leur air repose, je devine qu'ils l'ont faite sur un rythme un peu plus detendu que moi...
Vers 16h30, je suis dans le bus pour rentrer sur Guilin. Dehors, la pluie s'est remise a tomber a verses et je suis incapable de dormir sur mon siege en raison des coups de klaxon incessants du chauffeur, sans parler de tous mes voisins qui se raclent la gorge et reniflent ou ronflent en permanence. Ca, plus la pluie, plus la fatigue, plus mes vetements trempes et sales font que je commence a etre de tres mauvaise humeur, et je me dis alors que la Chine a beau etre un tres beau pays, elle le serait bien davantage avec du soleil et surtout sans tous ces bruits immondes emis en permanence par une population aux antipodes du raffinement! Et c'est peu dire...
Peu apres 18h00, je remarque en regardant par la fenetre, que nous venons de passer devant la gare de Guilin. Je descends aussitot du bus, je recupere mon sac a dos et je me mets a marcher sous la pluie, heureusement un peu plus calme, en direction de la meme auberge ou j'etais deja reste vendredi soir dernier.
En y arrivant, je reprends exactement la meme chambre que lors de mon premier sejour, je mets mes vetements et mes chaussures a secher (mission presque impossible avec cette humidite permanente...) et je fonce sous la douche que je prends bouillante. Et autant dire que je ne me gene pas pour faire durer le plaisir!
Vers 20h00, je decide de sortir histoire de trouver un restaurant. J'emprunte un parapluie a la reception et j'ai a peine mis le nez dehors qu'une enorme averse me tombe dessus! Je traverse la route, tachant de ne pas trop me faire mouiller et tout en slalomant entre les flaques d'eau, j'entre dans un grand centre commercial situe non loin de la. Je monte a l'etage des restaurants mais mis a part un "food-court" ne servant que de la cuisine chinoise, il n'y a rien d'autre. Puis, comme je ne suis tente ni par un KFC ni par un Mc Do, je decide de rentrer a mon auberge.
Etant de retour, je commande une assiette de spaghettis au petit bar de l'hostel. Et pendant que le cuisinier me prepare ca, je passe un quart d'heure a discuter avec trois nouvelles venues, deux danoises et une anglaise qui voyage avec une valise et qui se demande pourquoi elle n'a pas eu la bonne idee de prendre un sac a dos a la place...
Puis, une fois mon assiette terminee, je remarque qu'un jeune allemand vient de mettre le DVD de "Reservoir Dogs". Je le rejoins dans la petite salle de television et on regarde cet excellent film tous les deux, prenant tout juste le temps de demander l'un a l'autre notre pays d'origine respectif, la question habituelle. Mais je doit avouer qu'avec son accent typiquement germanique, j'avais deviner avant meme qu'il me le dise...
Dehors, c'est le deluge et quand on croit que la pluie se calme, ca n'est que brievement, le temps qu'une nouvelle averse ne reprenne la main. Meme assis sur mon canape, avec ma veste polaire, je sens l'humidite s'infiltrer entre mes couches d'habit et je vois un panache de vapeur sortir de ma bouche quand je parle.
Du coup, quand je monte me coucher, je prends un duvet supplementaire, et je mets mon reveil pour 6h00 du matin afin de ne pas rater mon vol pour Hong Kong ou je l'espere, le temps sera bien meilleur! Je realise que la pluie c'est bien et c'est meme essentiel mais a petites doses, et la je crois que j'en ai eu assez pour le reste de mon voyage!