Un demenagement, une promenade, un peu de shopping, du tennis et un hot-dog...
Au moment ou je m'arrache a mon lit, je sais que cette journee ne va pas etre la plus trepidante ni interessante de mon periple autour du monde. Non seulement, je pense avoir fait le tour de ce qu'il y avait a voir a Bukhara mais en plus, je ne suis pas vraiment motive a visiter des musees ou quoi que ce soit qui necessite que je quitte le centre ville.
Je prends donc tout mon temps pour ranger mes affaires et vers 10h00, je descends a la reception faire le check-out. Mes sacs sur le dos, je traverse deux ruelles, passant a deux doigts de faire un vole plane apres avoir poser le pied sur une rampe de marbre glissante, et j'arrive peu apres a la reception de mon tres joli nouvel hotel, le "Lyabi House Hotel" situe dans une splendide demeure a l'ancienne. Les formalites etant vite reglees, je peux aussitot monter dans ma grande chambre pour y poser mes affaires et prendre une douche.
Ceci etant fait, je ressors histoire de prendre mon petit-dejeuner. Je me dirige vers la terrasse tenue par ce cher Mahmud pour constater que son restaurant est ferme le dimanche. Du coup, et sans vraiment d'autre option a disposition, je prends une table autour du charmant petit lac de "Lyabi-Hauz", la ou se trouvent ces restaurants pour touristes que je n'apprecie guere. Lorsque je demande quel est le prix pour deux oeufs, du pain et du the, le responsable me dit 3'000.00 Sums en prenant a peine le soin de me regarder. Je lui dis que 2'500.00 Sums me parait deja bien assez. Il grimace et me dit que c'est d'accord. Je m'assieds, on m'amene la commande et au moment ou je demande du sucre pour le the, il me repond depuis le bar que le sucre coute 500.00 Sums! Je reste deux secondes sans comprendre puis, n'ayant absolument pas l'intention de lui faire ce plaisir, je lui dis que finalement je n'en ai plus besoin et... je sors un sachet de sucre de mon sac a dos provenant de mon petit stock de "secours" contenant du the, du lait en poudre et du sucre justement!
Content d'avoir mis en deroute son petit stratageme, lui demontrant que tous les touristes ne sont pas des "vaches a lait" que l'on peut arnaquer a son aise, je termine tranquillement mon premier repas de la journee puis je passe vers lui ou je depose les 2'500.00 Sums sous ses yeux en le remerciant. Il reste muet, ne detournant meme pas le regard mais ca n'a plus aucune importance, et je peux repartir avec le ventre plein et l'esprit leger!
Vers midi, je decide de me laisser entrainer dans le dedale de ruelles etroites de la vieille ville, la ou vivent les habitants du quartier historique, restant tranquillement a l'ecart des grands monuments ou affluent les hordes de touristes. Pendant ma promenade, et sous une chaleur caniculaire, je ne croise pas grand monde, juste des enfants qui jouent ci ou la, quelques ouvriers occupes a reparer leur maison, et meme quelques vestiges des annees sovietiques sous la forme des celebres "Lada", la voiture du camarade communiste par excellence. Celles-ci ont depuis ete presque toutes remplacees par des milliers de "Daewoos" suite aux accords commerciaux entre la Coree du Sud et l'Ouzbekistan. Pour le reste, j'apprecie surtout les belles portes anciennes, sculptees et colorees, bien plus gracieuses que les antennes paraboliques qui poussent comme des champignons sur les toits des maisons.
Je passe l'heure suivante dans ma chambre d'hotel, profitant de sa relative fraicheur et de la television. Puis, et malgre mon manque chronique de motivation depuis le reveil, je suis soudain pris d'une folle envie de melon, un fruit que j'adore manger en ete et qui me ferait le plus grand bien au milieu du paysage alimentaire motone de l'Ouzbekistan. Ayant trouve un nouveau but a ma journee, je repars en prenant le chemin qui longe le canal en direction de l'Est ou j'ai remarque, le jour precedent, une serie de petits magasins vendant des fruits et legumes.
Quand j'y arrive, une dizaine de minutes plus tard, je me retrouve dans la ville nouvelle de Bukhara loin de l'image de carte postale du centre historique, mais sans etre horrible pour autant. C'est juste vide, surdimensionne et sans charme, comme toutes les villes baties par les sovietiques... Heureusement, je parviens a trouver une epicerie ouverte malgre le fait que l'on soit dimanche et je repars avec deux petis melons dont le parfum va s'impregner au tissus de mon petit sac a dos durant le reste de l'apres-midi. Il ne me reste alors plus qu'a revenir vers le centre, empruntant un chemin different qui me permet de traverser une nouvelle zone guere interessante formee de maisons quelconques et de parcs a moitie abandonnes ou tronent des bustes de marbre dont celui de Abu Ali Ibn Sino, un illustre philosophe, physicien, medecin et poete originaire de Bukhara disparu il y a tout de meme plus d'un millenaire, et plus connu chez nous sous le nom latin de Avicenne.
Une fois de retour dans le quartier touristique, je decide de faire un tour du cote des anciens bazaars couverts histoire de voir si je pourrais tout de meme ramener un petit souvenir car avec le talent des artisans ouzbeks, ce ne sont pas les jolies choses a ramener qui manquent. J'entre donc dans une boutique qui vend des echarpes et comme il s'agit d'un objet utile et prenant peu de place dans mon sac a dos, j'en trouve un qui me plait et je l'achete pour trois fois rien. Mais c'est surtout la conversation tres ouverte que j'ai avec la vendeuse qui rend ce petit moment de shopping si special et interessant.
En effet, apres avoir discute du prix et de la qualite de ses echarpes, elle me demande ce que je pense de l'Ouzbekistan du point de vue d'un europeen, et surtout combien d'annees de retard son pays a sur le miens. Au final, nous passons une demi-heure a parler de politique, chose que je pensais presque impossible dans ce pays, et meme de religion, un autre sujet tres sensible. Et j'en retiens que si les europeens voient le president Karimov comme un dictateur, les ouzbeks le voient comme une autorite necessaire a la transition entre communisme et modernisme capitaliste. Et ils semblent d'ailleurs penser la meme chose sur les actions de MM. Poutine et Medvedev en Russie, ce qui au fond, ne m'etonne pas vraiment. Quand je repars, elle m'invite a repasser la voir dans quelques annees, et de prendre ma "femme" avec moi car comme tous les gens ici, elle trouve etonnant qu'a 32 ans, je parcours seul le monde au lieu d'etre marie et avoir des enfants!
Je traverse ensuite la place centrale de la ville ou trone la statue de Hoja Nasrudin, une sorte de fou-savant celebre dans de nombreuses histoires locales et immortalise sur son ane (le moyen de transport de nombreux paysans d'ici), saluant la foule, la main sur le coeur comme le veut la chaleureuse tradition ouzbek.
Apres cela, et comme l'apres-midi touche gentiment a sa fin, je retourne a mon hotel ou j'emprunte une assiette et une petite cuillere afin de manger goulument les deux petits melons qui trainent dans mon sac a dos, en plein soleil, depuis plus d'une heure.
C'est devant la television que je passe le debut de soiree, une chaine russe diffusant la finale homme du tournoi de tennis de Roland Garros. Et lorsque le match se termine, aux environs de 21h00 locales, je commence a sentir la faim revenir. Je descends donc a la reception ou je rends ce que j'y ai emprunte un peu plus tot, je paie deja pour la nuit que je vais passer dans ce joli hotel puis je pars a la recherche d'un restaurant. Malheureusement, la meme histoire vecue le matin se repete et ne voulant pas remplir les tables des restaurants a touristes, je me contente d'un gros et delicieux hot-dog comme seuls les ouzbeks savent les preparer, que j'accompagne avec un coca. Puis, n'ayant plus rien a faire en ce dimanche de pure detente, je rentre aussitot me coucher!